Camille Claudel par Maïté PETIT

Camille CLAUDEL

Camille Claudel, artiste de grand talent, femme passionnée à la personnalité forte et entière et cependant fragile, eut un destin hélas tragique.

Elle nait en 1864, l’aînée de 4 enfants dont son petit frère Paul qui deviendra le célèbre poète et écrivain. Elle tient probablement son caractère contrasté, décidé et autoritaire de ses parents : Louis Prosper, son père, sauvage, taciturne et anticlérical et Louise Athénaïs, sa mère, toujours accablée de malheurs, distante et qui n’embrasse jamais ses enfants. La famille, de petite bourgeoisie, vit en vase clos; l’atmosphère y est austère et les querelles sont incessantes.

Peut-être influencée par “L’écorché”, sculpture de Ligier-Richier qu’elle a l’occasion de contempler souvent à Bar le Duc où elle passe une partie de son enfance, elle est très précocement attirée par le modelage qu’elle pratique avec la glaise  rapportée presque quotidiennement à la maison et où elle enrôle autoritairement ses frères et soeurs sur lesquels elle exerce un fort ascendant, parfois cruel, particulièrement sur Paul qui pourtant l’admire beaucoup.

Et dès l’âge de 15 ans elle est taraudée par le désir de sculpter. Mais il lui est impossible d’entrer à l’Ecole des Beaux-Arts alors interdite aux femmes. Elle s’inscrit donc en 1882 à l’Académie privée Colarossi (en payant le double des élèves masculins!). Elle y fréquente le milieu cosmopolite des artistes et se fait très vite remarquer par Boucher, sculpteur déjà confirmé, qui la conseille et l’encourage vivement. C’est lui qui lui fait rencontrer Auguste Rodin qui jouit déjà, à l’époque, d’une notoriété certaine.

Immédiatement elle est subjuguée; elle dit de lui : ” C’est un astre resplendissant qui donne vie à tout ce qu’il touche; il a des mains de magicien.” Dès 1884, elle travaille dans son atelier où elle taille les mains et les pieds des sculptures du maître, passage obligé pour tout élève. Mais bien vite son talent éclate et elle occupe une place de plus en plus importante dans l’atelier…et la vie de Rodin qui la consulte sur tout. Elle devient son assistante puis sa maîtresse.

Camille inspire Rodin qui est follement amoureux. Durant cette période leur vie affective et artistique est fusionnelle et l’on ne sait plus qui du maître ou de l’élève a inspiré l’un ou copié l’autre. Mais c’est toujours Rodin qui signe l’oeuvre achevée et Camille souffre de la situation d’autant plus que Rodin est marié et que leur relation doit rester secrète. Rodin ne quittera jamais sa femme et Camille l’accepte de moins en moins. Cela provoque des scènes violentes de plus en plus fréquentes qui aboutissent finalement à une séparation.

A partir de 1892, Camille s’installe donc seule et travaille éperdument pour son propre compte désormais. Elle taille dans l’onyx, le marbre et le bronze et réalise de nombreuses oeuvres telles la Valse, la Petite Châtelaine, l’Age mûr, l’Imploration, Persée, les Baigneuses, etc… La période est féconde. Pourtant la séparation d’avec Rodin la laisse désemparée et dans une profonde et insupportable solitude. Son amour, devenu haine, l’entraîne dans une paranoïa qui ne fera que s’aggraver.

La rupture définitive intervient en 1898 et à partir de cette date, désespérée, Camille s’enfonce lentement et inexorablement dans la dépression…Finalement son frère Paul, à elle toujours très attaché, mais qui n’a jamais accepté la vocation artistique ni le mode de vie de sa soeur, décide de la faire interner dans un asile psychiatrique où elle passera, en totale déshérence, les 30 dernières années de sa vie, oubliée de tous, sauf de son frère qui viendra de temps à autre lui rendre visite.

Malgré ce destin particulièrement triste et tragique, Camille Claudel reste pour nous, aujourd’hui, une femme au génie créateur immense et qui laisse une oeuvre abondante et frémissante de vie, de beauté, de passion et de sensibilité.

Maïté PETIT

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L’écriture poétique par Emile MARTIN

La lecture des poèmes

 Pour celui ou celle qui est chargé d’en estimer la valeur poétique est toujours problématique. Peut-on se permettre des remarques à quelqu’un qui, comme on le sait, croit avoir bien fait ? Existe-t-il des normes en la matière ? Cependant, il est possible, en signalant les défauts et les faiblesses d’une œuvre, d’éclairer l’auteur en le fai­sant remonter jusqu’aux sources de la poésie.

Je précise : qui dit « sources »  dit « origines »  et, à l’origine, il y a nécessairement quelque chose dont un poète en herbe (et les autres aussi) doit prendre conscience, et ce n’est pas facile.

Si des poèmes manquent cruellement de charme, de style, d’émotion, de saveur…et j’en passe, ce n’est pas généralement parce que leur auteur méconnaît la langue française, oublie ou néglige les images ou tro­pes qui donnent à un poème sa couleur, utilise les rimes de manière excessive comme si elles étaient fondamentales et autres petites exigences, c’est parce qu’il n’a pas réussi à remonter à ces sources dont il a été question précédemment et qui sont en lui. Il ne sait pas s’écouter. Il y a toujours un peu de narcis­sisme chez un poète et c’est naturel, sinon indispen­sable.

On aura beau lui dire : « renseignez-vous à propos des figures de style, de l’ écriture poétique en général (si cela existe), consultez quelques ouvrages traitant de poésie pour mieux savoir ce qu’elle est ou doit être, relisez les grands maîtres, etc. », est -ce que ce sera profitable à celui ou à celle qui s’aventure dans un domaine où la médiocrité et la banalité ne sont pas admises ? À tout prendre, il vaut mieux encore, comme pour tout art, se livrer à l’excentricité ou à la fantaisie la plus baroque plutôt que d’écrire ce que n’importe qui peut écrire.

Ce n’est pas ce que je souhaite étant donné mon attachement au sens qui, même s’il n’est pas l’essen­tiel, doit assurer la communication : Communiquer ! Quoi ? Comment? Pourquoi ?, telles sont les ques­tions que tout poète doit se poser.

Il veut rendre compte de ce qu’il ressent, il veut bien sûr partager sa passion pour le monde, pour les humains, pour ce que l’on appelle la « nature »  sans se contenter des mots de tous les jours, sans cependant mépriser ces mots, mais en sachant qu’ils ne suffisent pas car ils en disent toujours trop…ou pas assez. Ou ils le disent mal. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’ils ne sont pas toujours en adéquation avec le ressenti du poète. En inventer d’autres alors ? Non, on ne peut communiquer avec des mots totalement nou­veaux. Reste à exploiter ceux qui ont le plus de chance de remplir cette délicate mission : exprimer du neuf avec du vieux.

Tout poète sait qu’il a à sa disposition des moyens pour cela et qu’il peut parvenir à ses fins mais aupa­ravant il y a plus urgent. Je m’explique en prenant un exemple : voici un magnifique ciel d’automne, à la tombée du jour, qui semble inspirer un poète. Celui-ci va alors tenter de trouver les mots qui conviennent pour évoquer ce que produit en lui cet espace-temps vespéral. Fort bien, mais n’est-ce pas prématuré ? Les mots doivent venir après. Après quoi ? Après ce que ce spectacle a fait naître non seulement en son esprit mais en son corps même, après ce que l’on peut appeler des images puisque c’est bien l’imagina­tion qui a été impressionnée et qui va réagir. Et ce sont ces images qui commandent à ce moment ; naissantes, elles se manifestent de façon brouillonne, souvent accompagnées d’une sorte de brouhaha qui n’est pas encore du langage mais qui va le devenir, nécessairement. Et c’est là que l’effort du poète doit intervenir afin de traduire en clair ce qui n’est à l’ori­gine, comme l’a écrit Michel Serres, « qu’un bruit de fond ».

La grammaire veille toujours mais, à ce niveau-là, elle n’y est pour rien ou pas grand-chose. Nous avons affaire à une autre sémantique et, obéir à celle-ci sans autre forme de procès, conduit à la poésie pure. Certains poètes en restent là mais, en général, ce langage primitif subit un traitement. Opération ô combien difficile !

Je viens d’évoquer le nom de Michel Serres, un des philosophes les plus attachants de notre épo­que et qui a, outre de nombreuses études et analy­ses fort savantes, perçu le phénomène poétique de manière originale. Il a dit, à propos d’un poème de Verlaine La guêpe : « Que le poète doit impérati­vement écouter son corps tout d’abord, sa cœnesthésie, d’où peuvent surgir des éléments entremê­lés, en partie sonores et liés aux impressions visuel­les éventuellement ».

C’est le bruit de fond auquel il a été fait allusion précédemment. Toutes ces manifestations sont à la fois de nature physiologi­que, phonologique et linguistique. Il faut savoir en tenir compte puisque c’est sur elles que le langage va s’appuyer puis se révéler afin de raconter la petite histoire que le poète cherche à mettre au clair de façon originale et personnelle.

Nul besoin donc de se précipiter et d’aller cher­cher les mots qui ne sont peut-être pas faits pour cela, n’ayant pas été « traité ». Ce serait risqué et c’est précisément ce que font certains poètes apprentis et parfois même ceux qui ont de l’expé­rience (j’en fais partie), ce qui les conduit à privilé­gier des mots qui veulent simplement décrire ou rendre compte. Or, en poésie, les mots n’ont pas de compte à rendre, sinon de leur propre activité, de ce bouillonnement intérieur.

Il reste toujours, dans un poème, quelque chose de ce bourdonnement primitif un peu brouillon, de l’imperfection grammaticale des débuts du lan­gage.

Il suffit alors d’écouter et de s’écouter.

La contemplation du ciel dont il était question précédemment n’est plus qu’un prétexte, une occa­sion. Un poète n’est pas un peintre bien qu’il en ait souvent la vision et la sensibilité. Cependant, comme lui, il a un tableau à exposer. Seuls dif­fèrent les procédés et, bien entendu, les intentions et le choix de l’instrument pour opérer.

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Marie Laurencin par Maïté PETIT

Marie Laurencin vers 1912 (Source : BNF)

Voici le portrait d’une magnifique femme artiste qui connut un destin hors normes où elle fut tour à tour aimée, délaissée, entourée et solitaire. Marie Laurencin était une peintre figurative, portraitiste et illustratrice ; elle était également épistolière et poétesse. Marie Laurencin  publie en 1942 un recueil de poèmes intitulé Le Carnet de nuit, souvenirs de jeunesse et de ses débuts de carrière.

Née le 31 octobre 1883 à Paris dans un milieu modeste, elle décédera également à Paris le 8 juin  1956.

Son enfance un peu austère ne la prédestinait pas à une vie d’artiste et pourtant elle a côtoyé de plus ou moins près, selon les époques de sa vie, le tout Paris artistique : c’est ainsi qu’elle a croisé ou fréquenté Picasso, Braque, Max Jacob, Fernand Léger, Matisse, Cocteau, Jouhandeau, le Douanier Rousseau, Coco Chanel, etc.

Elle séduisait autant les hommes que les femmes. Son premier grand amour fut Guillaume Apollinaire qu’elle rencontra en 1907; leur histoire ne dura que 5 ans mais, bien que traversée par de nombreux orages, elle fut d’une rare intensité et l’on peut dire qu’elle a marqué durablement Marie Laurencin même si, dans son âge mûr, elle trouva douceur et complicité parfaite plutôt dans la compagnie des femmes. Elle fut en particulier la compagne de Nicole Groult sur la fin de sa vie.

Adulée par le public au tout début du 20e siècle, à la suite du salon des indépendants de 1907 où elle fut exposée pour la première fois, elle tombe ensuite petit à petit dans un oubli relatif et, jusqu’à aujourd’hui, peu d’expositions lui seront consacrées en France ; les livres la concernant sont d’ailleurs rares. Paradoxalement, elle est plus connue dans certains pays étrangers, comme le Japon où un important musée lui est principalement dédié.

En France, il faudra attendre le printemps 2013 pour qu’enfin une exposition parisienne lui soit entièrement consacrée et la fasse redécouvrir au grand public qui, en grande majorité, ne la connaissait absolument pas !

C’est lors de cette exposition que j’ai pu apprécier, en direct si j’ose dire, la peinture de Marie Laurencin d’où émane  poésie et charme fou. Son univers est merveilleux et semble tout droit sorti de l’enfance et des contes. Dans ses tableaux on rencontre nombre de femmes toujours un peu évanescentes, aux visages diaphanes avec de grands yeux noirs, mais étrangement dépourvus de nez. On y croise aussi parfois d’élégantes biches ainsi que d’autres animaux inattendus, le tout dans une atmosphère souvent aigre-douce et acidulée malgré l’utilisation de teintes tendres et pastel, jamais violentes. La peinture de Marie Laurencin est la traduction un peu décalée de la réalité de son époque, de son art de vivre au temps des années folles puis de l’art déco.

Comme la plupart des femmes artistes du début du 20e siècle, comme ses compagnes dans l’oubli relatif que furent Berthe Morizot, Suzanne Valadon ou encore Sonia Delaunay, Marie Laurencin n’a donc pas, en son temps, mais surtout plus tard, bénéficié de toute la notoriété qu’auraient méritée son immense talent, son originalité et sa créativité. On lui attribue en effet entre 1800 et 2000 tableaux ainsi que plus de 1400 aquarelles.

Je vous engage à faire plus amplement sa connaissance en lisant la biographie bien documentée de Bertrand Meyer Stabley (publiée chez Pygmalion en 2011). Vous y découvrirez comme moi, au-delà de son immense talent de peintre, une femme attachante à la vie contrastée mais riche et infiniment féconde.

La vie de Marie Laurencin vous donnera certainement envie d’admirer sa peinture. Pour cela, il faudra vous rendre au Musée de l’Orangerie à Paris où sont exposées dans une salle particulière, quelques-unes de ses trop rares toiles demeurées en France.

Maïté Petit 

www.musee-orangerie.fr/fr/artiste/marie-laurencin

 

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Printemps des Poètes : Villers Lès Nancy

 

À l’occasion du Printemps des poètes dont le thème de cette 20e édition est l’Ardeur, la section APAC-54 se réjouit de vous accueillir dans les salons du Château de Madame de Graffigny à Villers-lès-Nancy pour une soirée poétique le :

Vendredi 23 mars 2018 dès 18h45

Une scène ouverte à tous permettra aux poètes confirmés ou en herbe de déclamer leurs textes ou ceux d’auteurs de leur choix.

Un accompagnement musical par le groupe Jeudi soir rythmera ces déclamations poétiques.

Après le verre de l’amitié, un repas auquel vous pouvez vous inscrire clôturera ce moment de convivial partage

Spectacle pour tous.

Entrée libre.

Renseignement  06 81 77 72 44

 

 

 

 

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La vie secrète du fonctionnaire d’Arnaud Friedmann

L’APAC vous donne rendez-vous au Novotel Saint Jacques de Metz le : Samedi 9 juin 2018 dès 16h30 pour son café littéraire de fin de saison. Arnaud Friedmann nous présentera son recueil de nouvelles : La vie secrète du fonctionnaire 

Prix Louis Pergaud 2016

Prix de la Ville de Belfort 2017

www.arnaud-friedmann.fr

Cette rencontre littéraire animée par Lætitia Collin sera suivie d’un repas auquel vous pouvez vous inscrire.

Entrée libre

Renseignement :  06 86 70 49 11

4e de couverture

À quoi rêvent la policière le maître-nageur, la directrice d’antenne, le conseiller-clientèle de la SNCF, le militaire en retraite ? Où vagabondent leurs espoirs quand la routine ne suffit plus à tenir leurs existences, quand leur conscience professionnelle se heurte aux exigences modernes du monde du travail ?

Avec tendresse et humour, Arnaud Friedmann compose dix portraits d’hommes et de femmes, atomes perdus du grand corps de la fonction publique, figures universelles de celles et ceux qui, soumis à la déshumanisation de leur activité, s’inventent des résistances, petites ou grandes ; qui osent, à l’occasion d’une rencontre ou d’un moment critique, briser la routine, faire un pas de côté pour échapper à la surenchère des réglementations, s’affranchir des obsessions absurdes de la hiérarchie et vivre, peut-être, leur vie.

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Printemps des Poètes : Metz

www.lesimpromptus.com

Dans le cadre du Printemps des Poètes dont le thème de cette 20e édition est  L’Ardeur,  l’APAC a le plaisir de vous convier au Novotel Saint Jacques de Metz le :

Samedi 17 mars 2018  dès  16h30

La compagnie Les Impromptus.com  vous présentera 45 minutes de leur spectacle 

La voix de son maître  (Texte de Raymond Devos et chansons d’antan)

Au-delà de l’hommage à Devos, Bourvil, Brel, Brassens…, Philippe Voivenel et Marie-Lou Bistocchi souhaitent réveiller notre mémoire collective pour que ce patrimoine culturel ne soit pas oublié sur les étagères de nos médiathèques.

Cette conviviale rencontre, mêlant rires et chansons sera suivie d’une scène ouverte à tous, poètes confirmés ou en herbe, et d’un repas auquel vous pouvez vous inscrire.

Entrée libre

Renseignement : 06 86 70 49 11

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Salon Le Livre en Hiver

Une réussite pour cette 6e édition du Salon le Livre en Hiver qui s’est déroulée le 20 janvier 2018, dans les grands salons de l’Hôtel de Ville de Metz.

Autour de Vincent Bailly dessinateur, parrain et invité d’honneur du salon, le Carré des bulles, des éditions des Paraiges et de la jeune maison d’édition le Crayon à Roulettes, c’est une cinquantaine d’auteurs qui se sont retrouvés pour leur rencontre avec le public.

Plaisir toujours renouvelé de partager dans une ambiance conviviale, ce moment chaleureux au cœur de l’hiver messin.

Évelyne Méducin

 

 

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Écrivain public par Zaz CHALUMEAU

Un vieux métier d’avenir

Un peu d’histoire…

Le métier d’écrivain public n’est peut-être pas le plus vieux métier du monde… mais son origine remonte néanmoins à l’Égypte ancienne, en la personne du « scribe ».

Aussi étrange que cela puisse nous paraître, les pharaons de cette époque ne savaient en effet ni lire ni écrire. C’est donc le scribe qui est chargé de rédiger les registres d’entrées et sorties des aliments dans les greniers à blé et qui légalise par contrats tous les échanges possibles. Par ses connaissances de la lecture et de l’écriture, il tient donc une place de premier ordre dans la société.
Les scribes sont souvent fils de scribe et transmettent leur savoir à leur fils. Dès l’âge de cinq ans, l’élève apprend les signes ; son apprentissage, long et pénible, dure une dizaine d’années. S’il travaille en priorité pour la population pharaonique, il met son talent au service de tous et se trouve ainsi très proche du peuple. Muni de sa palette où sont rangés calames et encriers, il écrit toutes sortes de documents sur le papyrus.

Au Moyen Âge, le papyrus est toujours utilisé puis le parchemin. Muni d’un stylet d’os ou de métal, le scribe écrit sur des planchettes de cire. Couteaux, éponge, pierre ponce et plume d’oie complètent son équipement. Dans les monastères, il travaille avec d’autres (enlumineurs, doreurs, correcteurs, relieurs) pour copier des ouvrages. Animé par la foi, le scribe ne s’intéresse pas au contenu du livre ; toute son énergie et sa concentration sont orientées vers la réalisation de l’ouvrage.

À l’époque de Charlemagne, lui-même illettré, d’importantes réformes sont menées pour améliorer l’éducation qui se limite cependant aux clercs et aux nobles, le peuple paysan en étant exclu. Tandis que le latin demeure la langue d’une élite cléricale, intellectuelle et politique, le français connaît un développement important.

Après la Révolution de 1789, l’enseignement se développe et l’écrivain public perd un peu de son prestige sans toutefois complètement disparaître. Les gens du peuple ont toujours besoin de ses services.

Avec l’école obligatoire jusqu’à l’âge de seize ans puis l’arrivée de l’outil informatique de plus en plus performant et accessible à tous, on a pu craindre que le métier d’écrivain public s’éteigne. Il n’en est rien. Il s’est tout simplement modifié, adapté aux technologies modernes et besoins de ses contemporains.

Muni d’un téléphone portable, d’un ordinateur portable et d’un dictaphone, il reçoit ses clients ou se rend à leur domicile. Sa mission ? Écrire des courriers bien sûr, mais aussi des poèmes, des récits divers, des discours et même des biographies.

L’écrivain public du XXIe siècle

L’écrivain public d’aujourd’hui est souvent un professionnel libéral soumis à toutes les charges et impôts de cette catégorie. Depuis peu, il peut aussi déclarer son activité en auto-entrepreneur. Disposant d’un local ou travaillant chez soi, il peut recevoir ou se déplacer au domicile de ses clients.
Contrairement à la logique, l’allongement des études ne garantit pas aux différents diplômés des écoles une aptitude à se sentir à l’aise dans la rédaction de courriers et autres textes littéraires ou non. Et les correcteurs d’orthographe et grammaire dont sont équipés tous les ordinateurs sont de piètres outils pour qui ne maîtrise pas les subtilités de la langue française.
Il n’est donc pas rare de voir des hommes et des femmes dotés d’un bac plus un nombre impressionnant d’années d’études avoir recours à l’écrivain public pour écrire un article, corriger une thèse ou rédiger un discours. Pour le client, le professionnel de l’écrit a sur la secrétaire ou l’épouse de l’intéressé l’avantage de demeurer complètement dans l’ombre puisqu’il ne se montre jamais aux côtés du client et ne signe jamais (sauf sur demande du client) ce qu’il écrit : le poème, le discours ou la biographie, par exemple, après paiement de la facture, restent la propriété exclusive du donneur d’ordres. L’écrivain public a de plus un devoir de discrétion voire de confidentialité : le secret professionnel.

Comme tous les métiers, celui d’écrivain public, riche en possibilités d’expression, tend à s’organiser en plusieurs spécialités. Certains exercent leur art dans les domaines administratifs et sociaux tandis que d’autres se tournent plutôt vers le rédactionnel ou le secrétariat indépendant.

ZAZ-ECRITOIRE

À mon compte depuis 2004, je travaille pour des professionnels et des particuliers.

Chirurgiens et médecins ont recours à mes services pour saisir leurs courriers lorsque la secrétaire en place, en maladie ou congés, leur fait défaut, ou en supplément en cas de surcroît temporaire d’activité. Des artisans m’appellent pour effectuer les travaux de secrétariat qu’ils n’ont pas le temps de faire eux-mêmes et qui ne peuvent faire l’objet d’une embauche à temps plein ni même à mi-temps. Une association me demande de faire un publipostage, la saisie et la mise à jour d’un fichier. Un éditeur me confie la correction des articles qui composent son magazine. Une mairie me sollicite pour transcrire les fichiers audio de ses conseils municipaux et rédiger les procès-verbaux. Un comité d’entreprise me demande de transcrire leurs réunions mensuelles, en verbatim ou non. Un chef d’entreprise me sollicite pour la rédaction d’un discours, par exemple à l’occasion du départ en retraite d’un salarié.

Des particuliers prennent contact avec moi pour composer un poème pour célébrer un mariage, un baptême, un anniversaire, des obsèques. D’autres ressentent le besoin de mettre des mots sur leur souffrance suite à un décès, un divorce, une longue maladie, un accident. Ils me racontent leur expérience et, grâce au dictaphone discret, je rédige chez moi un texte fidèle au récit. Et puis, la grande tendance, les romans de la vie.

À une époque où l’on parle de familles éclatées et recomposées, à l’ère de la communication intercontinentale spontanée qui tue la communication entre voisins de palier, mes client(e)s éprouvent le désir de laisser un témoignage à leurs descendants. Alors que la tradition orale s’est peu à peu perdue avec l’avènement de la télévision qui règne en maître dans les foyers, l’écrit prend à nouveau la relève. Les personnes âgées racontent l’histoire de leur famille pour que les générations futures sachent d’où elles viennent. La demande émane d’ailleurs parfois des plus jeunes ; il n’est pas rare que des « enfants » se mettent ensemble pour offrir ce cadeau insolite à leurs parents : le roman de leur vie. Feuilles réunies par une simple baguette ou livre imprimé et relié par un professionnel, l’ouvrage s’inscrit ainsi dans la mémoire familiale.

Le métier d’écrivain, tellement varié et passionnant, a de l’avenir !

Zaz Chalumeau

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George Sand par Maïté PETIT

Portrait de George Sand 1838

Huile sur toile peinte par Auguste Charpentier
   Musée : Musée de la Vie romantique

Une rebelle face à son siècle !

Celle qui a eu toutes les audaces…

           Depuis des générations, la mémoire de George Sand était embaumée dans l’expression lénifiante et convenue de « La Bonne Dame de Nohant ». Pourtant, elle fut si irrespectueuse des convenances !… Il est temps de mettre fin à ces clichés.

               Oui, elle a eu toutes les audaces, publiques et privées : celle de s’habiller en garçon et de fumer le cigare, celle de dénoncer l’aliénation du mariage et d’affirmer les droits de l’amour-passion, celle de croire au génie du peuple et d’écrire selon son cœur. Elle a cru à la souveraineté de l’art, à la profondeur des traditions populaires, à la mission sociale de la littérature, en inventant une image moderne de l’écriture engagée. Par la force du travail, elle a édifié une œuvre colossale. George Sand, de son vrai nom Amandine Aurore Lucile Dupin a marqué son époque et fut pour le monde entier une figure flamboyante de la France.

            Alors, démodée notre George Sand ?

            Non, c’est notre contemporaine ! Jadis vivement critiquée, aujourd’hui trop souvent réduite à quelques titres, l’œuvre de Sand est pourtant d’une richesse et d’une cohérence indiscutables. Elle a occupé la scène littéraire de mai 1832, date de la publication d’Indiana,  à sa mort en juin 1876, laissant inachevé un dernier roman : Albine Fiori, soit 44 années de travail assidu pour une production considérable dans des genres très divers : roman, autobiographie, théâtre, essai, article, préface, conte, nouvelle, pamphlet politique et même quelques pages de poésie…

            George Sand écrivait avec une facilité déconcertante, fluidité et spontanéité, c’est ce qui a fait toute la beauté de sa correspondance. Elle a bien un style à elle et ce qu’elle nous décrit, on le voit, on l’imagine, on le ressent avec intensité.

            Pour découvrir l’incroyable diversité de son œuvre, entrez dans une librairie, évitez les titres dont vous avez déjà, peut-être, entendu parler, tels que Lélia  ou La Petite Fadette…Peut-être choisirez-vous Consuelo, suivi de La Comtesse de Rudolstadt ; vous y rencontrerez l’aventure, la musique et Venise. Plongez-vous dans sa correspondance en osant Histoire de ma Vie. Si vous préférez les nouvelles, essayez Le Secrétaire intime, La Marquise ou  Mouny-Robin.

            Dans le domaine du roman, vous avez le plus grand choix, d’Indiana (1832) au  Dernier Amour (1867), en passant par Jacques (1834), Mauprat (1837), La Filleule (1853) etc. Plus de 70 romans à son actif ! Je ne vous énumérerai donc pas toute l’œuvre romanesque de cette grande dame de la littérature française…Mais comment ne pas évoquer quand même les romans « de la campagne », ceux qui ont bercé notre jeunesse (enfin, la mienne !) : La Mare au Diable, La Petite Fadette et  François le Champi.

            George Sand a été, tout au long de sa vie, en relation avec une quantité d’artistes, dans tous les domaines : peintres (Delacroix, Théodore Rousseau, Corot, Jules Dupré), photographe (Nadar), musiciens (Liszt, Chopin), poète Alfred de Musset) etc.

            Elle a écrit, sur la condition féminine, des romans qui ont été considérés par les femmes évoluées de l’époque comme révolutionnaires. Elle y met en scène des héroïnes positives, des femmes qui luttent pour vivre à égalité avec les hommes et être reconnues à part entière dans la société.

            Alors, « rétro » notre George ?……  

Maïté Petit

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Portraits croisés

De la benjamine à la doyenne…

de 17 à 95 ans…

            L’A.P.A.C. fait encore mieux que Tintin (qui s’adresse aux lecteurs  de 7 à 77 ans ) pour ce qui est de l’âge de ses adhérents ! En effet, entre les 95 ans de la doyenne, Éliane Wickleder-Maguin et les 17 ans de la benjamine, Héloïse de Ré, il y a 82 ans, excusez du peu ! Appliquons, comme cela est d’usage, le privilège de l’âge à Éliane.

Éliane est née en 1922. Après une enfance passée à Joeuf (54), elle vit depuis de très longues années à Onville (54) dans la riante, champêtre et lumineuse vallée du Rupt de Mad qui a toujours beaucoup inspiré sa veine artistique. Elle a cinq filles, cinq petits-fils et deux petites-filles. Elle n’a pas poursuivi d’études au-delà du B.E.P.C. mais sa curiosité toujours en éveil lui a permis de développer, avec succès et grand talent, de nombreuses passions artistiques tout au long de sa longue et riche existence.

Au premier rang de ces passions, la première, chronologiquement, est le chant dont, toute jeune, elle aurait aimé faire son métier; il s’en est d’ailleurs fallu de peu puisqu’elle obtient, en 1945, le premier prix d’un concours qui l’amène à exercer cette activité, avec un certain succès, durant trois années environ, au conservatoire de Nancy et à Radio Lorraine où elle se produit, seule au micro, une fois par mois. Un contrat lui est même proposé pour partir chanter aux Etats-Unis auquel elle doit hélas renoncer pour raisons familiales (à l’époque, il n’était pas question de partir si jeune aussi loin !). Ainsi prend fin son grand rêve de jeunesse…

Mais heureusement son grand amour de la musique trouve à s’exprimer autrement; elle dirige ainsi des chorales d‘enfants pour lesquelles elle écrit des chants, paroles et musique ; durant toute sa vie, et encore aujourd’hui, Éliane joue du piano ; elle peint aussi sans discontinuer, dans tous les styles, ne répugnant jamais à explorer de nouvelles techniques ou univers picturaux : il faut voir sa maison qui a tout l’aspect d’une galerie d’art !

Et puis Éliane écrit, beaucoup : des romans, des nouvelles et surtout de la poésie (voir les deux poèmes joints à cet article écrits à des périodes diamétralement opposées de la vie de notre poétesse). Mais il lui faut atteindre 90 ans pour enfin publier (grâce au soutien actif de l’APAC dont elle est depuis longtemps une fidèle adhérente) son premier recueil de poèmes, Pêle-Mêle, qui reçoit un excellent accueil et pour lequel elle est l’invitée de notre Café Littéraire de Metz, qui rassemble, ce jour-là, ses nombreux amis autour d’une très belle qualité d’écriture poétique et de beaucoup d’émotion.

Les goûts artistiques d’Éliane sont très variés et assez classiques: Mozart, Chopin, Gounod, Schubert (en musique), les impressionnistes (en peinture), Musset et Victor Hugo (en littérature). Malgré ses nombreux talents, elle est restée simple et modeste, elle aime la franchise et rejette les prétentieux ; elle aime surtout rire et faire rire ; sa devise est d’ailleurs : « Souris et l’on te sourira » et ceux qui ont la chance de la connaître bien peuvent témoigner que ce ne sont pas là que des mots…

Souhaitons à nos deux si sympathiques et talentueuses adhérentes et amies, une pleine réussite dans la suite de toutes leurs activités et créations artistiques ainsi qu’une vie toujours aussi riche et féconde où elles continueront à éclairer le monde qui les entoure de la lumière et du charme de leurs emblématiques sourires.

                               Bernard APPEL

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